En février dernier, Michèle Perroulaz monte au sommet du téléphérique du Sex Rouge, aux Diablerets (VD), pour profiter du paysage. Ne possédant pas de titre de transport pouvant lui octroyer une réduction, elle paie plein pot: 79 fr. l’aller-retour depuis le Col du Pillon. De retour chez elle, notre lectrice se rend compte, avec stupéfaction, qu’elle aurait pu payer moins: un abonnement de ski d’une journée, qui permet la libre circulation sur toutes les installations de la station, coûte en effet 62 fr. Les nombreux skieurs ayant profité, comme elle, du panorama ce jour là ont donc payé 17 fr. de moins!
Cette surprenante surtaxe n’est pas une erreur, comme nous l’a confirmé la porte-parole de Glacier 3000, exploitant des installations. Il ne s’agit pas non plus d’un cas isolé: vers cinq autres montagnes au moins, un forfait de ski journalier est moins coûteux qu’un aller-retour. C’est le cas à Zermatt (Gornergrat et Petit Cervin), Saas Fee (Mitelallalin), Engelberg (Titlis) ou encore Mürren. Dans cette dernière station, la différence atteint des sommets: au plein tarif, l’accès au Schilthorn coûte 42 fr. de plus au piéton qu’au skieur (voir tableau)!
Plus cher pour moins de prestations
Comment expliquer cette différence, alors que l’abonnement couvre davantage de prestations? Le skieur peut, en effet, emprunter les remontées mécaniques à volonté (y compris à la descente s’il le souhaite) et profiter des pistes entretenues par la station. Le piéton, lui, ne peut rejoindre le sommet et redescendre qu’une fois.
«Les piétons qui paient le plein tarif sont rares, car beaucoup possèdent des abonnements qui réduisent le prix de moitié (abonnement général CFF, demi-tarif, Swiss Travel Pass), ou bénéficient des prix spéciaux accordés aux tours opérateurs», précise la porte-parole de Glacier 3000. L’exploitant ajoute que les prix du marché ne sont pas les mêmes pour un abonnement de ski et pour l’accès à un sommet réputé des Alpes suisses. En vendant le forfait au prix de l’aller-retour, l'activité ski ne serait plus concurrentielle.
Snowboard oui, sac poubelle non
Selon notre service juridique, cette manière de faire n’est pas illégale. En théorie, les exploitants pourraient même interdire à un piéton ayant acheté un forfait de ski de monter dans un téléphérique, ou exiger de lui qu’il paie la différence par rapport au prix du ticket piéton, voire même lui réclamer des frais pour utilisation frauduleuse du titre de transport, si une telle disposition figure dans leurs conditions générales.
Chose étonnante, lesdites conditions ne précisent pas qui a le droit d'acheter un abonnement de ski. Quid des snowboardeurs, des adeptes des raquettes ou du snowskate, voire de ceux qui veulent glisser dans un sac poubelle? Nos juristes estiment que tout matériel raisonnablement considéré comme un équipement de sport de glisse devrait pouvoir faire l’affaire – et il est peu défendable que le sac poubelle en fasse partie!
Autrement dit, qui veut profiter du bon air de la montagne tout en faisant des économies a tout intérêt à trimballer avec lui du matériel de glisse, qu’il l’utilise ou non... Ou à choisir une station dans laquelle un aller-retour jusqu'au sommet des pistes coûte moins cher qu'un forfait journée, comme Verbier (Mont Fort) ou Crans-Montana (Plaine Morte) par exemple.
Vincent Cherpillod