Chaque année, en Suisse, quelque 5400 cas de cancer du sein sont déclarés et 1400 femmes en meurent. Un diagnostic précoce augmente les chances de guérison et les cantons romands ont mis sur pied des campagnes de prévention (lire encadré). Ces examens ne décèlent toutefois que les tumeurs existantes. Or, il existe une prédisposition génétique (BRCA pour «Breast Cancer») de développer un cancer du sein ou de l’ovaire.
En 2013, l’actrice Angelina Jolie avait ainsi subi préventivement une double ablation des seins. L’actrice avait été déclarée porteuse de la modification du gène BRCA 1, ce qui portait le risque qu’elle développe un cancer au sein à 65% et à l’ovaire à 40%. Une autre altération, BRCA 2, augmente le risque à respectivement 45% (sein) et 11% (ovaires).
Histoire familiale
En Suisse, le gynécologue ou l’oncologue propose un conseil génétique aux femmes qui présentent certains types de cancer du sein ou dont plusieurs parentes proches ont développé un cancer du sein ou de l’ovaire. «On estime qu’une tumeur sur cinq est héréditaire et que moins d’une sur vingt seulement est due à une modification des gênes BRCA 1 ou BRCA 2», rassure d’emblée Khalil Zaman, oncologue spécialisé en cancer du sein à Lausanne.
Lors du premier entretien, le spécialiste recense les cas de maladie parmi les parents au premier degré (mère, sœur, fille) et au second degré (grands-mères, tantes et nièces). L’âge (avant 40 ans) joue aussi un rôle, de même que les rares cas de cancer du sein des hommes.
Test onéreux
En février, Martine*, dont la mère et la grand-mère ont toutes les deux eu un cancer du sein, s’est vu proposer le dépistage. Or, après une analyse détaillée, l’oncologue a jugé préférable d’approcher son assurance maladie, la CSS, pour s’assurer que l’examen était bien remboursé. «Quelle est la pratique en la matière?» demande Martine.
«Nous soumettons les cas limites à l’assurance maladie», confirme l’oncologue Khalil Zaman. Le premier dépistage dans une famillle coûte 4300 fr. S’il est positif, les suivants ne coûteront que 276 fr. La patiente prend en charge la quote-part de 10%, sans oublier la franchise annuelle.
Les caisses maladie remboursent toutes l’analyse génétique «en cas de suspicion de prédisposition à un cancer héréditaire», comme le prévoit l’ordonnance sur l’assurance obligatoire des soins. Chaque cas est néanmoins examiné individuellement. «Pour ce qui est de cette lectrice, les conditions sont réunies afin que le dépistage soit remboursé», précise la CSS. Les autres assureurs ont répondu dans le même sens.
Prévention ciblée
Même si le résultat du dépistage est négatif, le risque reste plus élevé que la moyenne et l’examen régulier reste de mise. S’il est positif, l’ablation des seins n’est, heureusement, pas la seule option. Les médecins préconisent aussi deux contrôles annuels, soit une mammographie et une échographie suivies, six mois plus tard, d’une IRM (imagerie par résonance magnétique).
La prévention du cancer des ovaires est plus complexe, car le diagnostic peut être posé à un stade avancé de la maladie seulement. Les femmes qui ont déjà une famille se voient proposer une ablation des ovaires et des trompes. Les autres subissent une échographie et une prise de sang semestrielles, toutes remboursées par l’assurance de base.
Martine reste libre d’accepter un dépistage. Elle peut en outre demander un soutien psychologique, un résultat positif étant bouleversant tant pour elle que pour ses proches parentes. Car celles-ci auraient alors 50% de risques d’être également porteuses de la modification.
Claire Houriet Rime
*Prénom fictif.
Polémique autour du dépistage
Améliorer la qualité
En février, le Swiss Medical Board a publié un rapport sur les mammographies proposées tous les deux ans aux femmes entre 50 ans et 69 ans. Les médecins reconnaissent qu’elles évitent entre un et deux cas de décès pour 1000 patientes. Ils estiment toutefois que, une fois sur dix, ils se révèlent faussement positifs avec, à la clé, un immense stress inutile. L’Office fédéral de la santé publique a réagi immédiatement pour soutenir ces campagnes de dépistage. Il veut par ailleurs améliorer la qualité des radiographies effectuées en dehors des programmes cantonaux.