Le top du top! En juin passé, la célèbre agence Standard & Poor’s (S&P) relevait d’un cran la note de solvabilité à long terme du canton de Vaud, la hissant ainsi au maximum possible («AAA»).
Ce genre d’évaluation est destiné aux investisseurs. Elle leur permet d’avoir une idée de l’aptitude d’un débiteur à respecter ses engagements grâce à une indication simple, mais basée sur un vaste ensemble de données. L’agence passe au crible, notamment, la planification financière, le budget, les investissements en cours et à venir, l’état de la dette, son évolution future et les perspectives économiques du canton.
Selon l’échelle S&P, le triple A vaudois récompense «une aptitude extrêmement forte à honorer les engagements financiers, c’est-à-dire à payer les intérêts et à rembourser le capital d’une dette». Dans le cas présent, Standard & Poor’s souligne aussi «la gouvernance, la gestion financière et la situation des liquidités très positives».
Onze cantons évalués
Vaud n’est pas la seule entité régionale suisse à être ainsi évaluée. Dix autres le sont également, dont le canton de Genève ainsi que les deux villes de Lausanne et de Genève en Suisse romande (voir illustration). Ailleurs, Zurich, Argovie et Schwyz sont également détenteurs du triple A à l’heure actuelle, une réévaluation s’opérant tous les six mois. Il s'agit d'une très belle performance lorsqu’on sait que, sur les 119 pays suivis par l’agence, seuls douze bénéficient d’une notation identique, dont la Suisse (lire encadré)!
Mais, si le Gouvernement vaudois est au top, il n’a pas toujours brillé. C’est d’ailleurs contraint et forcé qu’il a mandaté l’agence américaine en 2003, alors que sa dette atteignait des sommets. «Il s’agissait d’une condition impérative de plusieurs investisseurs pour nous prêter de l’argent», explique-t-on au Département des finances.
Le résultat fut alors médiocre: «Nous avons obtenu un A, ce qui nous plaçait au dernier rang des collectivités notées en Suisse et même derrière des pays comme le Botswana (A+)!» Le canton a alors empoigné le taureau par les cornes et fait passer sa dette nette de plus de 8 milliards à 700 millions en 2012, amenant S&P à relever sa note à six reprises.
Emprunter à bon compte
A Genève aussi, on précise que le recours à S&P était «absolument indispensable».
«Nous empruntons énormément auprès des marchés et les établissements financiers veulent connaître rapidement notre solvabilité», explique Roland Godel, porte-parole du Département cantonal des finances. Et, s’il concède que Genève fait moins bien que son voisin vaudois, Roland Godel souligne néanmoins «que «AA-» n’est pas une mauvaise notation et qu’elle constitue un des éléments permettant d’emprunter à de très bonnes conditions, avec un taux moyen de 1,94% en 2013». De quoi compenser largement les 55 000 € demandés chaque année par Standard & Poor’s pour son travail!
Sébastien Sautebin
Bonus web:agences de notation: quelques liens et documents
Un pouvoir démesuré?
Selon leurs détracteurs, les grandes agences de notation américaines, Fitch, Moody’s et Standard &Poor’s, parfois baptisées les «trois sorcières», peuvent plonger un pays dans une spirale infernale rien qu’en abaissant sa notation. La Cour des comptes italienne affirme, ainsi, que la dégradation de sa note en septembre 2011, à ses yeux injustifiée, lui aurait coûté pas moins de… 143 milliards de francs!
Par quelle diablerie? Lorsqu’un Etat voit sa note dégradée, ses emprunts sur le marché peuvent subir une forte hausse des taux d’intérêt. Cette situation fragilise encore ses finances, ce qui est susceptible de provoquer un nouvel abaissement de sa note, et ainsi de suite. «Les baisses de notation entraînent une aggravation des tendances déjà à l’œuvre. C’est comme pousser quelqu’un qui est au bord d’un ravin», estimait, en 2011, Pier Carlo Padoan, économiste en chef à l’OCDE.