La polémique sur les statines rebondit avec la parution d’un nouveau dossier à charge du médecin français Michel de Lorgeril: «L'horrible vérité sur les médicaments anti cholestérol». Et une campagne tonitruante, passant par unepétition en ligne, d’ores et déjà signée par 345 000 internautes, que nous signale une lectrice en nous interrogeant sur sa pertinence.
S’agissant de la pétition, elle est relayée sur le site de l’Institut pour la protection de la santé naturelle, une association belge qui s’est visiblement spécialisée dans ce genre d’actions. Elle est d'ailleurs régulièrement soupçonnée, notamment dans Rue89 (L’Observateur) et dans Hoaxbuster, d’être un aspirateur de données personnelles, celles des pétitionnaires ainsi transformés en clients potentiels pour la vente en ligne de thérapies alternatives. La pétition demande de «réunir des experts vraiment indépendants pour ré-examiner les données scientifiques existantes objectivement et revoir les recommandations officielles sur le cholestérol».
En fait, c’est surtout l’occasion pour le Dr Michel de Lorgeril de promouvoir son livre. Comme le Pr Philippe Even avant lui (La vérité sur le cholestérol», éd. du Cherche-Midi, 2013), il estime que ce type de graisse (lire l’encadré ci-contre) n’est pas aussi dangereux qu’on le prétend et que les statines profitent surtout aux laboratoires qui le produisent. Un constat qui n’est ni nouveau ni dénué de sens non plus, à en croire de nombreux spécialistes.
Ce qui irrite le milieu médical, c’est le ton employé pour le dire et la suspicion étendue à l’ensemble des praticiens qui prescrivent ce médicament. Car, en soit, l’utilisation des statines n’est guère contestée lorsqu’il s’agit de faire baisser la cholestérolomie des patients qui risquent une maladie cardiovasculaire. En revanche, son usage à grande échelle, parfois avant même d’avoir suggéré un régime alimentaire moins gras ou de l’inciter à cesser de fumer, en agace plus d’un. D’autant qu’il faut le prendre à vie et qu’il n’est pas sans effets secondaires, principalement hépatiques, musculaires et rénaux.
Tout est donc affaire de modération… Modération dans la prescription des statines, mais modération aussi dans la dénonciation de leur usage abusif. Car suite à la diffusion d’une émission sur leurs dangers supposés par la chaîne ABC TV, en 2013, des chercheurs ont calculé que 60 000 patients ont interrompus leur traitement, sans chercher à savoir s’ils le pouvaient ou non (Medical Journal of Australia)…
Christian Chevrolet
Le cholestérol
Le cholestérol est une molécule, proche du lipide, indispensable à notre organisme. Il n'existe qu'une sorte de molécule, et il n'y a donc pas – contrairement à ce qu'on dit – de bon et de mauvais cholestérol.
En revanche, il est insoluble et utilise donc, pour se déplacer dans le sang, des protéines spécialisées, appelées lipoprotéines. Une catégorie, dite de faible densité (abrégé LDL), le transporte du foie dans les artères, où il a parfois tendance à rester fixé sur les parois.
Une autre catégorie de protéine, dite de haute densité (HDL), fait exactement le travail inverse: elle ramène le surplus de cholestérol vers le foie afin d'y être dégradé et éliminé, débarrassant du même coup les artères de celui qui s'était accroché aux parois lors du voyage aller.
Donc, si le taux de HDL est plus élevé que celui de LDL, tout va bien. Mais si c'est le contraire, les médecins recommandent de réduire la consommation des aliments qui élèvent le taux de LDL (tous ceux qui contiennent des acides gras saturés) et de favoriser ceux qui ont l'effet inverse (les fruits et les légumes notamment).
Lire également notre article «Huit colles sur le cholestérol».