Depuis 2012, les CFF paient 200 millions de plus à la Confédération pour le prix annuel du sillon. Ce qui leur a permis de justifier l’augmentation du tarif des billets en décembre 2012. Mais ce qu’il faut savoir aussi, c’est que l’ex-régie fédérale a simultanément adopté un nouveau système de tarification qui pénalise les voyageurs au profit du trafic marchandises.
Et ce n’est pas fini…
Désormais, le prix du kilomètre est pondéré par le poids, les trajets de jour, la pollution, la qualité des voies et le nombre d’arrêts. Dans les faits, le trafic marchandises payait 3.83 fr. par kilomètre avec l’ancien système, en 2012, contre 4.34 fr., en 2013, soit une hausse de 13,3%. Le bond a été autrement plus spectaculaire pour les passagers qui ont vu le prix du kilomètre s’envoler de 34,8% en grimpant de 4.20 fr. à 5.66 fr.!
Cette nouvelle tarification ne semble pas encore satisfaire la direction des CFF. Dans les colonnes du Tages-Anzeiger, Philippe Gauderon, chef des infrastuctures, déclarait que la vitesse et les contraintes exercées lors des freinages et des accélérations étaient également des paramètres qui influençaient l’usure des voies. Et qu’il faudrait donc en tenir compte dans le calcul.
Or, selon lui, les trains de banlieue qui circulent vite et enchaînent les accélérations et les freinages useraient davantage les rails que les lourds convois de frêt. Pour l’Office fédéral des transports, cette théorie n’est, pour l’instant, ni prouvée ni réfutée. Des études tenteront d’y voir plus clair pour fournir une base de réflexion à la mise en place du prochain système de tarification. Cette révision devrait intervenir en 2017, sachant que la Confédération facturera 100 millions de plus aux CFF par année pour les infrastructures. Or, si la thèse de Philippe Gauderon venait à être soutenue, les usagers pourraient payer un lourd tribut.
L’Autriche nettement moins chère
L’Autriche, qui a une topographie assez proche de celle la Suisse, établit sa calculation en fonction du poids, du train et de la demande. L’usure est un facteur également pris en considération par les Chemins de fer fédéraux autrichiens (ÖBB), mais les notions d’accélération et de freinage n’entrent pas du tout en ligne de compte.
En 2013, le trafic marchandises devait payer 3.22 fr. par kilomètre et les passagers 3.31 fr. seulement. Pour ces derniers, la charge est donc 41,5% moins élevée qu’en Suisse. Et, comme on peut le constater, l’écart avec ce qui est facturé au frêt est sensiblement moins grand aussi. Il n’y a donc pas de subventionnement croisé entre les deux secteurs comme c’est le cas dans notre pays. Monsieur Prix a d’ailleurs déjà pointé du doigt cette politique tarifaire, mais les CFF refusent de faire des commentaires sur ces allégations.
Les usagers paient pour le frêt
Relevons malgré tout que la situation est encore plus déséquilibrée en Allemagne qu’en Suisse. En 2013, le prix du kilomètre était facturé 3.32 fr. au trafic marchandises et 5.55 fr. aux passagers pour les liaisons courtes, voire 7 fr. pour les longues distances. Et Mario Theis, responsable des tarifs auprès de Deutsche Bahn (DB) de commenter: «La différenciation de prix n’est pas basée uniquement sur les coûts, mais également sur le marché.» Autrement dit, on prend dans la poche des usagers pour que le frêt puisse être compétitif.
Thomas Lattmann / yng