Le Conseil fédéral doit trancher au début de l’année prochaine. Si les ministres s’entendent, la Suisse se dotera d’un grand plan fédéral permettant d’évaluer le degré d’exposition de la population aux substances chimiques. La phase pilote commencera dès 2015. Elle permettra d’apprécier la faisabilité et les coûts d’une telle étude qui sera menée dans tout le pays en 2016 et en 2017. Le but du plus important recensement écoépidémiologique jamais réalisé dans le pays? Savoir avec la plus grande précision possible à quels degrés la population est polluée. Ou, du moins, à quel point elle est chimiquement imprégnée.
Le projet de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) risque de susciter de nombreuses réactions. C’est que ce grand travail de recueil peut être apparenté à un fichage généralisé de la population, avec les problèmes éthiques que cela suppose. De plus, trouver des traces de composés toxiques dans l’organisme n’est pas une preuve de maladie. Cela signale simplement qu’on a été ou que l’on est en contact avec des produits chimiques. Ces expositions peuvent néanmoins avoir un effet sur la santé. Cette étude devrait établir ces liens (ou pas) et déterminer aussi les substances les plus problématiques qui appelleraient des mesures pour protéger la population. Ce qui avait déjà été le cas avec le plomb, banni de l’essence en 2000.
Sur le long terme
Dans ce sens, la démarche de l’OFSP n’est pas banale. Elle a d’ailleurs nécessité une longue mise en place. Alors que le projet devait être présenté au Conseil fédéral en 2013, il a été reporté à deux reprises et sera finalement présenté l’an prochain. Daniel Dauwalder, porte-parole à l’OFSP, reconnaît qu’il a pris une dimension plus large que prévue: «Au lieu de se limiter à décrire uniquement l’exposition de la population aux produits chimiques et à mettre en évidence des carences nutritionnelles, un suivi sanitaire sur le long terme est envisagé.»
Ce suivi devrait permettre, entre autres, d’évaluer l’impact sur la santé de certaines expositions. Une telle étude nécessite une préparation minutieuse ainsi que la prise en compte de nombreux paramètres. «Il s’agit d’un projet de longue haleine. Aucun élément ne doit être négligé afin, notamment, de l’intégrer dans les différentes stratégies nationales de politique de santé et de recherche», ajoute Daniel Dauwalder.
Tous imprégnés…
La Suisse n’est pas le premier pays à se doter d’un tel outil. Les Etats-Unis ont dégainé les premiers dans les années 1930. Depuis, les progrès de la toxicologie ont permis de passer au crible un grand nombre de substances dans les organismes vivants: animaux et humains. A chaque fois, et dans tous les pays ayant procédé à ce genre d’analyses, les résultats sont les mêmes: nous sommes tous imprégnés. Les quantités et leur impact sur la santé restent à déterminer. Le projet de biosurveillance suisse devrait apporter des réponses au plus tôt en 2017.
Annick Chevillot
Substances nocives
Mieux comprendre pour mieux agir
Plus de 60 millions de substances chimiques – pas toutes toxiques – ont été décrites dans la littérature scientifique. Parmi elles, 143 835 ont été déclarées depuis le début des années 1970 auprès des différentes autorités compétentes en matière d’autorisation de mise sur le marché. Utilisées commercialement, on les retrouve logiquement partout. On en mange, on en boit, on est en contact avec elles ou on les inhale.
Comment reconnaître ces poisons quotidiens? Comment les éviter? C’est tout l’enjeu de ce nouvel ouvrage, résultat de recherches approfondies menées durant dix-huit mois. Le constat est simple: nous sommes en contact avec une multitude de produits chimiques dont nous ne connaissons pas les effets sur l’organisme lorsqu’ils sont ingérés à petites doses chroniquement.
Ce dossier est composé de dix chapitres. Il passe en revue les différents modes de contact d’un grand nombre de substances et aussi leur effet «cocktail». Il donne des pistes pour agir et diminuer les sources d’exposition. A suivre également sur la page Facebook du dossier: «Poisons quotidiens».
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L’auteure dédicacera son ouvrage au Salon suisse de la santé.