S’exposer au soleil, c’est bon pour le corps. A condition, toutefois, de le faire avec modération, et en respectant les conseils de prévention qui émanent des milieux spécialisés. Car les conséquences d’une surexposition peuvent s’avérer dramatiques: en Suisse, 2100 personnes développent chaque année un cancer de la peau, un chiffre en augmentation constante. Et, s’il est prouvé que les crèmes solaires réduisent l’exposition aux UV, elles ne constituent pas pour autant un bouclier suffisant.
Que vaut l’indice de protection?
L’indice de protection (IP, parfois noté FPS) qui figure sur toutes les étiquettes est une mesure de leur efficacité, uniformisée à l’échelon mondial. Il indique la perméabilité du produit au rayonnement solaire: un indice 20, qui laisse passer 1/20e des rayons UVB, en arrête donc 95%. Un indice 50 en arrête, quant à lui, 98% (lire encadré). Autrement dit, une peau badigeonnée de crème 20 est exposée, en vingt minutes, au même rayonnement qu’une peau non protégée en une minute. Dès lors, peut-on en conclure qu’une protection 20 permet de passer, sans danger, vingt fois plus de temps au soleil? Eh bien non.
Un tube par jour!
Les indices sont déterminés par des tests standardisés, au cours desquels une dose de 2 mg de produit par cm2 de peau est appliquée à des volontaires. On observe ensuite le temps nécessaire au rougissement de la peau. Le hic? Cette quantité dépasse, et de très loin, celle qu’utilise Monsieur Tout-le-Monde. Jugez plutôt: zone intime et cuir chevelu déduits, la surface de peau d’un homme de taille moyenne est d’environ 1,5 m2. Pour atteindre la dose requise, il faudrait donc se tartiner 30 g de crème à chaque fois! Un petit tube de 50 g ne suffirait même pas à deux applications. Quant au grand format de 200 g, il ne passerait pas la journée avec une famille de quatre personnes.
Dégâts pas toujours visibles
Pour autant, même un aficionado de la crème solaire qui appliquerait réellement les doses requises ne peut espérer s’exposer aussi longtemps sans danger. Primo, parce que l’indice de protection ne s’applique qu’aux rayons UVB, principaux responsables des coups de soleil, et pas aux UVA, qui accélèrent le vieillissement de la peau. Certes, la majorité des produits protègent aussi contre ces derniers. Mais, pour avoir le droit d’arborer un logo anti-UVA, une crème peut se contenter d’offrir une barrière équivalente au tiers de celle anti-UVB.
Secundo, la couche peut s’altérer pour diverses raisons (eau, sable, etc.). Enfin et surtout, les dégâts causés par les rayons UV ne sont pas toujours visibles. Eviter le coup de soleil ne garantit pas l’absence de danger! «Toute irradiation va induire des dégâts dans l’ADN, précise Olivier Gaide, dermatologue et chef de clinique au CHUV. Le but d’une crème est de diminuer la quantité d’UV reçue, pas de la répartir sur une plus longue durée.» On ne peut donc pas multiplier le temps pendant lequel on ne prend pas de coup de soleil – qui dépend de son type de peau – par l’indice de protection.
Plutôt que d’appliquer une couche unique d’indice élevé le matin, le spécialiste recommande de garder un tube sur soi et d’en remettre régulièrement. Autres conseils impératifs: se couvrir la peau ou se mettre à l’ombre aux heures où le rayonnement est le plus intense (11 h à 15 h), et ne pas exposer les enfants au soleil direct avant l’âge d’un an.
Vincent Cherpillod
Éclairage
Indice de protection 15, 30 ou 50?
Est-il indispensable d’opter systématiquement pour la plus haute protection? Pas vraiment: alors qu’une crème d’indice 30 arrête près de 97% des rayons UVB, une crème 50 n’en stoppe que 1% de plus. La différence de prix, en revanche, n’est pas toujours aussi ténue! Chez Migros, la Nivea Sun Milk 50 coûte par exemple 36% plus cher que la Sun Milk 30 (8.40 fr. les 100 ml contre 6.12 fr.). Idem avec le lait solaire de la marque Sun Look: la 50 est 40% plus onéreuse que la 30 (7 fr. les 100 ml contre 5 fr.).
«Il n’y a plus beaucoup de différence au-delà de l’indice 30, confirme Cathy Maret, porte-parole de la Ligue suisse contre le cancer. Nous conseillons un indice de 15 au minimum; ensuite, il faut voir au cas par cas, en fonction notamment de l’exposition prévue. L’essentiel est de se souvenir qu’aucune crème n’offre une protection totale.»