En Suisse, les antibiotiques vétérinaires peuvent être administrés si le but est thérapeutique. Il est donc permis d’en donner aux animaux lorsqu’ils sont malades (pneumonie, etc.). En revanche, il est strictement interdit d’en faire usage pour favoriser leur croissance, comme partout dans l’Union européenne d’ailleurs, en raison de l’antibiorésistance essentiellement (lire encadré).
Mais, si cette pratique est interdite en Suisse, il est tout à fait autorisé d’importer et de vendre des produits carnés issus d’élevage, qui utilisent de tels traitements. Or, en dehors de l’Europe, de nombreux pays recourent aux antibiotiques pour améliorer le rendement de leurs exploitations, en favorisant la croissance des animaux. On peut ainsi citer l’exemple du bœuf ou du porc d’Argentine, d’Australie, du Canada, des Etats-Unis ou de Nouvelle-Zélande ou encore du poulet ou de la dinde du Brésil, de Chine ou du Paraguay*.
Rayons dépourvus
Faut-il dès lors s’inquiéter de manger de tels produits? L’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires assure que, au moment de l’abattage, les résidus d’antibiotiques ne sont plus décelables et que, par conséquent, cette viande est considérée comme sans danger.
Par ailleurs, en matière d’étiquetage, la Suisse se montre plus sévère que ses voisins européens. En effet, lorsqu’une denrée est issue d’un pays qui autorise ce mode de production et que l’importateur n’a pas été en mesure de prouver que l’élevage en question renonçait à ces pratiques, les commerçants sont tenus d’en avertir les consommateurs. Ils doivent en effet le préciser sur l’étiquette avec la mention «Peut avoir été produit avec des antibiotiques et/ou d’autres substances antimicrobiennes comme stimulateur de performance».
Un pointage dans les rayons des grandes surfaces et des discounters nous a permis de constater qu’il n’y avait quasiment pas d’articles qui étaient pourvus d’une telle mention. Chez Coop par exemple, seuls quatre étaient concernés au moment de notre passage: l’entrecôte et le tournedos de Bison Fine Food du Canada ainsi que le romsteck et le filet Premium Beaf d’Argentine. Et, chez Migros, nous n’avons trouvé que la viande séchée de bison Migros Sélection des USA.
Distinction impossible
Comme on le voit, la loi suisse tient à protéger et à informer les consommateurs en fournissant un maximum d’informations. Elle est, sur ce point, plus exigeante que l’Union européenne. En lisant attentivement l’étiquette, il est donc possible de faire son choix en toute connaissance de cause. Avec un bémol toutefois sur la transparence, puisqu’il est difficile de déterminer si un antibiotique a été utilisé à des fins vétérinaires ou pour booster la croissance de l’animal. D’autant qu’il s’agit des mêmes traitements…
Marie Tschumi
*Liste complète des pays dans l’aide-mémoire disponible sur www.blw.admin.ch
Dans le détail
Freiner la résistance!
En Suisse, l’utilisation d’antibiotiques pour soigner les animaux est soumise à des contrôles et à des valeurs limites. Quant aux stimulateurs de performance, ils sont interdits depuis 1999 pour protéger la santé humaine. L’objectif était d’empêcher l’émergence de bactéries et d’autres microbes résistants aux antibiotiques (antibiorésistance), depuis longtemps utilisés pour soigner les infections humaines et animales. Martin Rufer, responsable du département de la production, du marché et de l’écologie à l’Union suisse des paysans soulève également des questions éthiques. Selon lui, il est essentiel de respecter le bien-être de l’animal en privilégiant une production naturelle. Or, les hormones de croissance vont à l’encontre de tels principes.